478 : Rassemblée aux Monts Valenvins, la Délégation hennequine, le premier cercle de dotés, naquit de la rencontre d’âmes déchirées par la même vision qu’elles ne comprenaient pas. Nombre d’années d’efforts forgèrent une doctrine commune ; les premières fondations du Collège des dotés. Ainsi fédérés par l’égide d’Hermant Dechapt, novices et adeptes apprirent à dompter les énergies brutes qui secouaient leur esprit. Ce foyer primitif devint ainsi sanctuaire, une enclave du savoir de la dotation dans un monde encore hostile à sa compréhension.
890 : Près de quatre siècles après la fondation du Collège, le roi Marcial unit les terres fragmentées en un empire : Hennequince. Le Collège des dotés, bien que discret, trouva sa place dans cette nouvelle ère. Ses augures établirent alors des ponts avec les factions politiques émergentes et amena ainsi au premier schisme du Collège. Les laudateurs, fervents défenseurs de la tradition, et les puritains, en quête d’une dotation épurée, s'opposèrent, mais sous l’ombre de Marcial, un fragile équilibre fut maintenu.
892 : Lorsque Marcial soumit la dernière région récalcitrante, Hainot, il fit appel à la sagesse des dotés. Le Conseil royal, tout juste créé, accueillit en son sein des sibylles, les conseillers pourvus de dons formés par le Collège. Ces derniers, guides discrets mais influents, insufflèrent leur érudition dans les réformes profondes qui allaient modeler l’Empire.
1066 : L’instabilité politique culmina avec la destitution de Radebert II par un Conseil royal devenu hégémonique. Bien que le Collège resta officiellement neutre, certains groupuscules de dotés, tels que l’Ordre de Livienne, furent impliqués dans des intrigues locales, illustrant l’influence persistante des dotés sur la destinée de l’Empire.
1154 : Sous Maudet Ier, l’Empire retrouve une stabilité apparente. Ce roi visionnaire supprima le Conseil et érigea une assemblée consultative, tout en s’entourant de conseillers, y compris des sibylles. Le Collège, en écho à cette centralisation du pouvoir, renforça son réseau de cercles de dotés à travers le continent, s’assurant un rôle dans la réorganisation politique et spirituelle de l’époque.
1320 : Le podestat Bruno reconnut officiellement l’importance des sibylles dans la gouvernance. Si cette tentative de formalisation fut finalement abolie par ses successeurs, elle consacra l’omniprésence des dotés dans les cercles du pouvoir, un équilibre ténu entre influence mystique et méfiance politique.
1451 : Face aux scandales du régime de Balderic, le Sénat réforma le système politique pour contenir les excès du pouvoir personnel. Durant cette période troublée, le Collège des dotés retrouva un rôle proéminent, ses augures et sibylles jouant le rôle d’arbitres et de conseillers pour guider un Empire vacillant.
1624 : Le Collège des dotés reste jusqu’à ce jour une institution respectée, bien que toujours vigilante face aux caprices du pouvoir temporel. Sous des cieux lourds de présages, le Collège semble s’inquiéter des événements qui surviennent au Nord-Est du continent depuis maintenant 3 ans. Face à l’imperméabilité de l’Empire, il semble pour le Collège que seuls la dotation et le savoir pourront écarter les ténèbres rampantes et offrir aux âmes hennequines un espoir tremblant.
Érigé dans les hauteurs austères des monts Valenvin où les vents froids sculptent les cimes, le Collège des dotés prend place à la manière d’un sanctuaire modeste mais chargé de mysticisme. Loin des forteresses imposantes ou des palais fastueux, ce bâtiment semble presque se fondre dans le paysage rocailleux, reflétant l’humilité et la sobriété qui imprègnent l’idéologie originelle de la Délégation hennequine. Construit en pierre grise, extraite des montagnes environnantes, le collège arbore une architecture simple mais fonctionnelle. Ses murs épais gardent le froid à distance, tandis que des toits en ardoise sombre se cambrent sous le poids des neiges hivernales. La modestie du Collège des dotés est stratégique : éviter d’éveiller la jalousie ou l’hostilité du pouvoir de l’Empire tout en respectant les principes d’humilité prônés par la dotation.
L’entrée principale, une porte double en bois de chêne gravée de motifs runiques discrets à raison de leur usure, s’ouvre sur un hall spacieux mais dépouillé, éclairé par des lanternes à huile suspendues à des chaînes de fer. De là, un dédale de couloirs mène aux différentes ailes du bâtiment. La grande librairie, cœur intellectuel du collège, occupe une aile entière. Ses étagères, construites dans des essences sombres, montent jusqu’au plafond, abritant des manuscrits fragiles et des rouleaux soigneusement entreposés. L’odeur du parchemin vieilli et de la cire d’abeille emplit l’air, et un silence presque religieux règne en maître, uniquement perturbé par le grattement des plumes sur le papier et le vent sifflant aux fenêtres. Le collège reflète ainsi une hiérarchie particulière, où le rang dépend de l’érudition et non du pouvoir. Cela se manifeste dans l’agencement du bâtiment : pas de grandes salles de trône ou de quartiers luxueux, les chambres des dirigeants sont presque identiques à celles des novices pour illustrer l’égalité fondamentale dans la quête de savoir de chacun.
Visibles depuis nombre de salles d’étude et de chambres d’étudiants, plusieurs autels dédiés à chaque divinité du panthéon hennequin se trouvent sur un amas rocheux voisin, accessible par un chemin escarpé. Ces autels, faits de pierres brutes et ornés de symboles gravés par des mains expertes, offrent des points de communion entre les dotés et le panthéon. Là, sous les cieux ouverts, les dotés se rassemblent pour des rites collectifs ou des méditations solitaires, cherchant guidance et équilibre.
La discipline du Collège repose sur une structure méticuleusement organisée, mêlant autonomie des cercles et rigueur hiérarchique. Héritage direct de la Délégation hennequine, l’institution privilégie une formation en petits groupes autonomes, appelés cercles, qui peuvent se constituer librement pour explorer les arcanes de la dotation. Ces cercles se signalent généralement au Collège par missives ou rencontres formelles, bien que certains, portés par des ambitions ou des doutes, s’égarent temporairement hors de son giron.
Chaque novice commence son parcours au sein d’un collège si ce n’est le Collège directement. Ces lieux deviennent des refuges d’apprentissage où les novices encore hésitants face à leur dotation explorent leurs capacités sous la supervision attentive de leurs instructeurs. Les précepteurs, qu’ils soient augures ou séides expérimentés, guident ainsi les novices dans leurs premières recherches et expérimentations. L’enseignement insiste autant sur la maîtrise des dons que sur la compréhension des conséquences physiques et mentales qu’implique leur utilisation, encourageant une utilisation raisonnée et mesurée.
La hiérarchie au sein du Collège, bien qu’inflexible, favorise la transmission des savoirs par le biais d’un système de tutorat. Les aînés, en tant que tuteurs, prennent un ou deux novices sous leur protection et transmettent leur savoir au fil d’un apprentissage structuré. Ce modèle d’entraide mutuelle consolide une cohésion forte au sein des cercles, instaurant une véritable communauté d’échange où chaque membre joue un rôle. Chaque doté évolue dans cette structure au travers de grades progressifs. Le novice, en proie à de grandes interrogations, se forge aux côtés des hérauts, qui tendent à maîtriser leur don. Les séides, avertis et capables d’aborder des disciplines plus complexes, prennent eux-mêmes des hérauts sous leur coupe. Les augures, maîtres de leur discipline, assurent l’enseignement des novices tout en poursuivant leurs propres recherches, tandis que les sibylles, conseillers émérites, incarnent auprès de leurs mandataires l’excellence de leur art. Au sommet, les Grands-Augures, sages parmi les sages, veillent sur le Collège, guidant l’institution et répartissant les sibylles auprès des dirigeants de l’Empire.
Le Collège des dotés entretient un lien étroit avec l’Empire de Hennequince, notamment grâce à sa tradition séculaire plaçant certains de ses membres au cœur du pouvoir impérial : les augures les plus érudits et respectés peuvent être promus au rang de sibylle, un titre prestigieux qui marque le point culminant de leur apprentissage. Ces sibylles sont alors envoyés auprès des dirigeants influents de l’Empire — qu’il s’agisse de grands seigneurs, de gouverneurs régionaux ou même de rois — pour les servir et les conseiller durant une période de dix ans. Pendant ce mandat, les sibylles agissent en tant que guides spirituels et stratégiques, offrant leur sagesse et leur maîtrise des arts mystiques pour résoudre les crises et renforcer les assises du pouvoir. Les sibylles profitent ainsi de cette place de choix pour maintenir un lien discret mais constant avec le Collège des dotés, leur transmettant nombre de rapports sur les décisions du pouvoir et toute information stratégique et politique susceptible d’être utile à l’ordre des dotés.
Une fois leur mission achevée, ces sibylles sont libres de choisir leur avenir. Beaucoup d’entre eux, forts de leur expérience, se consacrent à la fondation de cercles de dotés, des congrégations de praticiens de la dotation qui deviennent bien souvent les germes de nouveaux collèges, propageant ainsi l’influence de la dotation dans tout Hennequince. Cette relation mutuelle, mêlant service et indépendance, tisse un lien vital entre le Collège des dotés et l’Empire, consolidant leur importance respective. Le Collège est ainsi un point névralgique rayonnant à travers le continent hennequin via les nombreux collèges qu’il a inspirés, qu’ils soient nichés au sein de cités denses, dans des villages reculés ou perdus au travers d’ermitages solitaires.
Il est ainsi courant de dissocier un collège accueillant un cercle de dotés du Collège des dotés.
Depuis 1514 et la réouverture sur le monde du continent hennequin, le Collège des dotés tente à timidement s'insinuer au sein de Septentrion malgré l'hostilité apparente du Completionem ; seuls quelques rares émissaires et sycophantes subsistent à raison de prudence et de discrétion.