Tandis que le reste des tribus nomades gasques s'unissaient sous la bannière de la maisonnée Ibbi-Shahan, des groupes mineurs refusèrent l’autorité de Mezian Ier. Leurs descendants sont aujourd’hui nommés les “nisèbes”. Établis dans les plaines arides au sud des Monts Tizqar, ces tribus n’ont jamais joui de grandes richesses ou d’une importance quelconque, ce qui explique le désintérêt de la Principauté naissante pour leur insoumission.
Ils se sont ainsi développés en marge de toute société, n’évoluant alors que très peu.
Après de nombreux conflits entre tribus, seules quatre d’entre elles subsistèrent, formant ainsi le peuple Nisèbe. La première a avoir échangé avec le reste du monde fut la tribu Nisaba, c’est ainsi que tous furent regroupés sous cette même appellation. Cependant, seuls ses membres reconnaissent ce nom, les autres se considèrant comme Warassunis, Irkallas ou Mattakis.
C’est seulement à partir de la fin de l’année 1349 que l’on retrouve des traces, en dehors de la Principauté de Gaçaferi, de ces peuplades nomades qui se sont peu à peu ouvertes. C’est assez vite qu’elles ont adopté le mercenariat comme mode de vie, ce qui pousse aujourd’hui certains jeunes de la tribu à partir pour ne revenir qu’à un âge avancé pour fonder une famille s'ils le désirent. Aujourd’hui persécutés par la Principauté, les nisèbes continuent de revendiquer les terres qu’ils occupent comme étant les leurs de par leurs ancêtres.
Bien qu’il existe des différences entre chaque tribu, il est possible de leur retenir des points communs aussi bien dans leur mode de vie que dans leurs coutumes. Leur population actuelle frise les sept cent individus, hors esclaves et hors jeunes mercenaires partis dans d’autres contrées.
Les Nisèbes, tribus insoumises de Gaçaferi, possèdent une peau brun foncé, marquée par le soleil brûlant du désert. Leurs cheveux sont noirs et souvent portés détachés ou enroulés sous des foulards colorés. Leurs yeux sont généralement sombres, bien qu’on trouve parfois des teintes noisette ou vert foncé.
Ils s’habillent de robes et de tuniques en coton teinté de blanc, d’ocre et de bleu, pratiques pour les déplacements dans le désert. Leurs bijoux sont artisanaux, souvent en argent, ornés de pierres semi-précieuses comme la turquoise. Les quelques tatoués, variant d’une tribu à l’autre, sont des motifs tribaux ou des versets sacrés tracés sur leurs mains, leur visage ou leurs chevilles. Ils ne portent que très peu d’armures, et les rares qu’ils acceptent d’enfiler sont faites ou bien de cuir ou bien de mailles et ne sont que rarement complètes.
Très fiers de leur culture qu’ils défendent corps et âmes, les nisèbes sont portés sur l’équitation, les carrioles où ils vivent sont tirées par des juments qu’ils traitent avec grande ferveur. Ceci explique aussi leur aisance en tant que cavaliers, ils sont en effet initiés très tôt au combat monté, aussi bien à l’aide d’arcs que de lances. Les nisèbes sont aussi de grands adeptes de koumys, du lait fermenté de jument contenant une légère dose d’alcool, qui se révèle être une boisson au goût particulièrement fort. La dotation a aussi chez les nisèbes une place significative dans la mesure où les dotés sont perçus tels des élus et sont presque sacralisés. Il sont alors le plus souvent érigés en chamans et dirigent dès lors les différentes tribus.
Enfin, l’une des particularités de ce peuple nomade est son lien étroit avec l’astronomie qui y est étudiée depuis des siècles afin de pouvoir établir un calendrier lunaire et ainsi prédire les différents moments religieux importants à leurs yeux.
Toutefois, leur culture est purement orale et se transmet au sein du clan, les nisèbes n’ont ainsi aucune utilité à savoir lire ou écrire ce qui explique leur méconnaissance totale à ce sujet.
Les nisèbes ont leurs propres rites et croyances qui semblent remonter à des temps immémoriaux. Ils ont pour seul dieu le soleil, qu’ils nomment “Birqani” et représentent sous la forme d’un équidé enflammé orné de deux cornes de flammes et aux yeux ivoires. Birqani serait le protecteur des steppes où évoluent les nisèbes et guide de leur civilisation ; il illumine le ciel si haut qu’il apparaît sous la forme d’une sphère, pour garder les nisèbes à l’abri de la Nuit-sans-Fin, éternel opposant à Birqani qui cherche à posséder la terre et ses Hommes. Les nisèbes considèrent les cycles de la lune comme étant l’oeil de Birqani, qui s’ouvre et se clôt ; pour défendre le monde, le regard de Birqani percerait les ombres nocturnes afin que la Nuit-sans-Fin arrive à son terme, laissant son œil d’ivoire sur la terre lorsque celui-ci sévit.
Les tribus nisèbes ont ainsi pris l’habitude de laisser au moins un feu allumé près de leurs campements tout au long de la nuit, par crainte d’être surpris par la Nuit-sans-Fin. De plus, à chaque nouvelle-lune, toutes les tribus nisèbes organisent d’importants bûchers honorifiques pour illuminer le désert en l’absence de la lune, autour desquelles ils festoient, chantent et utilisent nombre de percussions en espérant empêcher Birqani de s’endormir. À ces occasions les gasques racontent qu’ils illuminent le désert de mille et une étoiles et fendent le silence de la nuit jusqu’aux murailles de Hyseni Luya.
Inversement lors des pleines lunes, ils offrent divers présents symboliques à Birqani pour le remercier de sa protection, qu’ils brûlent pour lui délivrer.
Les flammes étant une forme du dieu Birqani pour les nisèbes, nombre de leurs coutumes tournent autour de son usage et sa maîtrise ; par exemple, pour passer à l’âge adulte, les jeunes nisèbes doivent braver la nuit à son apogée munis de simples torches, qu’ils doivent garder embrasées jusqu’à l’aube.
Lorsque l’un des leurs les quitte, les nisèbes enflamment leur dépouille à l’aube du jour, afin que le soleil les emporte avec lui et ne les laisse en proie au froid de Nuit-sans-Fin.
Les nisèbes ne sont pas épargnés par la dotation.
Spirituellement et politiquement les tribus nisèbes sont guidées par des chamans, voir des dotés, qu’ils considèrent touchés par les flammes de Birqani pour que ces derniers luttent contre la Nuit-sans-Fin et guident les leurs, quelle que soit leur dotation. Bien souvent ces chamans se réfèrent au feu lorsque des décisions importantes doivent être prises, qu’ils consultent pour essayer de déterminer la volonté du Dieu-Soleil.
Aujourd’hui, les nisèbes ne sont pas reconnus comme étant un royaume à part, ils n’entretiennent donc aucune relation particulière avec les différents états qui les considèrent comme une simple peuplade de la Principauté de Gaçaferi. Leurs seules relations avec le reste du monde sont ainsi commerciales.
La seule exception réside avec la Principauté elle-même avec qui les tribus entretiennent des relations assez hostiles, refusant toujours l’autorité de celle-ci. Bien que les tensions n’ont jamais conduit à des conflits armés, il est déjà arrivé que des soldats gasques massacrent des nisèbes et en capturent en esclavage. Les nisèbes ont en effet une réputation de sauvages auprès du reste du peuple Gaçaferi ce qui explique le traitement dont ils sont parfois victimes.
L’économie des tribus nisèbes est assez rudimentaire. Bien que leur mode de vie soit très autarcique, ils n’hésitent pas à troquer entre tribus lorsque l’occasion se présente. Côtoyant depuis des années la principauté de Gaçafari, ils ont appris à toujours conserver une bourse de kishars pour commercer avec les marchands avec lesquels ils s’efforcent de toujours rester en bons termes pour s’approvisionner en bois.
Toutefois, il n’est pas rare que des tribus cèdent au brigantisme et aux larcins pour différentes raisons ; considérant le désert comme leur territoire, chaque caravane qui emprunte leur terre devrait payer un dut, allant du simple recel de marchandise jusqu’à l'asservissement des caravaniers. Leur croyance ayant une part importante de leurs vies, ils n’hésitent pas si nécessaire à organiser des raids ou pillages au sein de scieries ou de forêts.
Pour renflouer leurs caisses, les nisèbes vendent bien souvent leurs services pour escorter des caravanes au travers leurs terres ou pour endiguer des afflux de monstres, bien qu’ils soient moins compétents que la compagnie de la griffe et du croc dans ce domaine.