Durant plus de cinquante ans, Livienne est restée très encadrée par le Conseil des clercs. Ce dernier, prenant la majorité des décisions quant à l’organisation du bourg, a également instauré un contrôle militaire important, visant à traquer les potentiels usages abusifs de la dotation. Le contingent, principalement composé de soldats, s’assume comme réfractaire à l’usage de la dotation, créant de ce fait des tensions inhérentes à l’opposition idéologique entre la population et les groupements militaires présents. De plus, le travail y est organisé en faveur d’une grande productivité. Si la population non-dotée est complètement libre quant aux choix de métiers et d’activité, la population dotée subit un contrôle plus important. De nombreux Séides capables d’échomancie sont envoyés dans les dispensaires de naissance, les écoles ou encore les orphelinats, dans l’optique de détecter des potentiels dotés non recensés. Ainsi, à l’âge de 14 ans, les dotés recensés sont pris en charge par des Augures dans des classes d’enseignement afin d’y recevoir les préceptes de la dotation. A l'issue de cet enseignement, les élèves sont fortement guidés vers des métiers correspondant à leurs capacités. Toutefois, certaines rumeurs populaires prétendent que les élèves dotés sont parfois violentés s’ils refusent le secteur d’activité proposé, expliquant ainsi la persistance de certains parents à cacher le don de leurs enfants.
Depuis quelques années, l’encadrement du Conseil des Clercs et la présence militaire tendent à diminuer, laissant de plus en plus place à l’auto régulation du Bourg.
À la découverte d’une quelconque dotation, les Liviennois doivent se rendre au Centre de recensement afin de s’inscrire dans le registre des dotés. Ces derniers peuvent également y être inscrits à leur insu, à la suite d’un contrôle de Séide. Toutefois, ce recensement s’apparente uniquement à un moyen de contrôle et d’information : les dotés sont fortement orientés vers des secteurs où ils peuvent utiliser leurs capacités, mais la population n’est en aucun cas réprimée ou forcée à aller à l’encontre de sa volonté.
Si le recensement est obligatoire, l’amende liée au non-recensement a récemment été supprimée.
Composé essentiellement de serfs et miséreux, le quartier de Fer se veut peu attrayant de par ses rudes conditions de vie. Les différentes bâtisses s’élevant en son cœur demeurent fragiles et rongées par la misère, celles-ci ayant été initialement conçues à partir de bric et de broc. Le bois ainsi que les pierres sommairement taillées sont les matériaux majoritairement utilisés afin de renforcer les fondations et façades du quartier tombant en ruines. Casernes et geôles de petite ampleur viennent faire le lien entre le quartier de fer et l’allée du Pionnier, certaines de celles-ci faisant office de postes régulant la population dotée et sa répartition dans la cité ainsi que dans les divers corps de métier.
Accueillant un grand nombre des entrepôts de la cité, le quartier de fer ne présente que peu d’établissements tels qu’auberges et tavernes. L’on raconte qu’à l’orée du quartier, quelques masures délabrées seraient uniquement vouées à la détention de lépreux jusqu’à ce que la mort leur permette de regagner la communauté locale, quoique certaines dépouilles ne soient enterrées aux côtés de défunts sains. Peu de soins sont accordés à ces malades, la population liviennoise s’étant détournée de ces maux incurables, faute de moyens.
L’allée du Pionnier n’est qu’un quartier de transition entre celui plus miséreux et les hautes sphères de la société liviennoise, selon la légende. La réalité est toute autre : les habitants de l’Allée sont des petits artisans locaux ou arrivés depuis peu avec un petit pécule, mais qui n’auront jamais la possibilité de s’élever plus haut. Il faut cependant souligner que la population du quartier de Fer représente un repoussoir pour les artisans, qui saisissent toutes les opportunités pour s’installer dans l’Allée du Pionnier. La caractéristique principale du quartier tient dans ses venelles regroupant les artisans par profession, et donnant lieu à un véritable sentiment identitaire qui culmine lors du Jour des Guildes, au début de l’été, lorsque les confréries se rassemblent pour procéder à un véritable défilé dans les rues du quartier. Des apothicaires plus ou moins compétents veillent à s’installer le long de l’axe principal menant à la Citadelle et rivalisent d’ingéniosité pour attirer le chaland ayant besoin de soins : déclame, affiches colorées, enseignes mouvantes suspendues… Il n’est pas rare que certains de ces apothicaires tiennent davantage du rebouteux que de l’homme de science, mais leur présence permet aussi à une certaine vie scientifique de s’épanouir à l’ombre des tilleuls plantés sur l’avenue principale.
Principalement reconnue pour ses nombreux autels destinés aux différentes déités du Panthéon Hennequin, le quartier de la citadelle du Traversier est composée de la haute-société liviennoise ainsi que de ses adjuteurs. Une importante partie des effectifs des casernes locales est déployée au cœur du quartier afin de filtrer la population s’y aventurant, les dotés étant bien souvent condamnés à demeurer en les bas quartiers. Si la répression est plus forte en les hauts-quartiers, les conflits entre dotés et puritains se voient d’autant plus exacerbés.
C’est en périphérie de larges autels accueillant les fidèles du panthéon que viennent s’élever de larges bâtisses et demeures bourgeoises. La citadelle en elle-même se voit entourée de hauts murs contenant les édifices les plus fastueux en son sein, scindant ainsi le quartier en deux parties distinctes. Si les richesses du quartier de la citadelle se voient bien supérieures à celles des quartiers suivants, l’architecture des lieux ne demeurent pas plus élaborée. L’on a ainsi privilégié de simples édifices peu ouvragés quoique leur taille soit imposante.
Livienne est traditionnellement un bourg paysan. La cité est entourée de nombreux champs et espaces cultivables. L’agriculture est l’activité la plus organisée par le Conseil des Clercs, suivant ainsi un calendrier de récoltes très strict et rentabilisé. Les corporations agricoles de dotés interviennent régulièrement sur les terres afin d’aider à la culture.
Le milieu médical possède une importance capitale au sein du bourg. Livienne possède une grande école de soignants, affiliée également à un centre de recherche sur la dotation et ses capacités de soin. Du fait d’une agriculture et d’une horticulture très développées, l’apothicairerie jouit également d’une place importante au sein de la ville. Ainsi, Livienne est médicalement très avancée quant au soin des blessures graves et ordinaires, mais elle est également pionnière dans les recherches quant au rétablissement de la santé mentale et physique des dotés ayant eu recours de manière abusive à leurs capacités.
La situation économique de Livienne n’a pas amené le développement d’un commerce extérieur d’envergure : la plupart des échanges en ville sont destinés à la consommation intra muros. La ville ne possède aucun véritable produit destiné à l’export et compte davantage sur son indépendance alimentaire plutôt que sur une possible ouverture aux autres cités. L’octroi assez élevé pour les marchandises arrivant des autres régions permet de maintenir un niveau de production et de prospérité économique relatif pour la population locale tout en bénéficiant aux Les foires agricoles sont courues principalement par les taverniers et autres travailleurs des métiers de l’alimentation, tandis que les artisans se fournissent directement chez les producteurs de matière première en dehors des murs. Cela a néanmoins permis le développement d’une guilde de portefaix dont les membres sont installés en bordure du quartier de Fer et louent leurs services à l’artisan le plus offrant.
La population liviennoise est réputée pour son sens du travail. En effet, de nombreuses corporations se sont fondées autour du secteur de l’agriculture et de la chasse, créant ainsi de nombreuses interactions sociales entre les différents travailleurs d’un même secteur. Ainsi, le travail y est une valeur fondamentale en terme de reconnaissance sociale, et les paresseux sont souvent pointés du doigt, considérés comme peu méritants. On retrouve également de nombreuses fêtes liées aux différentes périodes de récolte ou de chasse. Toutefois, la population travaillant essentiellement dans les secteurs primaires, ne sont pas particulièrement récompensés puisqu’ils touchent des salaires relativement bas, et ce, sans compter du prix élevé des produits issus de l’artisanat, principalement importés des villes voisines. Ainsi, la population est principalement pauvre, et ne compte que très peu de notables. Du fait des corporations et de l’organisation liée des différents secteurs de métiers, une forme de solidarité s’est créée au sein de la population. De plus, les habitants font régulièrement usage du troc.
Livienne accueille en son sein plusieurs petits groupes de laudateurs extrémistes contestant l’organisation planifiée de la dotation. En effet, prônant une utilisation dite « naturelle » et portée sur la réalisation des volontés divines, les sectaires rejettent profondément l’utilisation de la dotation dans l’optique de la rentabilité. Toutefois, du fait de la présence militaire, ces sectes n’ont que très peu de marge de manœuvre. On compte tout de même quelques actions notables comme par exemple la grande évasion de 1592, durant laquelle les extrémistes parviennent à faire évader trois sibylles de la Prison de Forvantoux. Les sibylles jugées responsables de certaines de diverses catastrophes naturelles ainsi que les sectaires sont cependant traqués, et retrouvés quelques semaines plus tard, avant d’être exécutés en guise d’exemple.
Ainsi, si les sectes extrémistes sont au cœur de nombreuses légendes et croyances populaires, leurs actions sont très limitées, et elles restent essentiellement l’objet de nombreux racontars plus ou moins fondés ou fantasmes.
Il n’y a pas de grande criminalité à proprement parler à Livienne, du fait du manque d’attractivité pour ce secteur d’activité. Il n’est cependant pas rare d’observer des vols à l’étalage ou à la tire lors des foires et autres marchés, perpétrés la plupart du temps par de jeunes enfants ou adolescents orphelins. Le Guet reste assez présent dans la cité et les patrouilles fréquentes, mais il n’est pas exclu qu’une partie des effectifs ait des accointances avec la petite pègre. En conclusion, Livienne apparaît comme une cité relativement calme par rapport aux autres du continent, malgré les quelques pans de criminalité indissociables de toute ville.